# L'attaque à la petite cuillère
Aujourd'hui, j''ai décidé de mettre en œuvre un casse pour m'emparer d'une cuillère. J'adore les petites cuillères - le symbole d'un bon repas, j'imagine. Pour l'instant, j'ai réussi à m'en emparer temporairement dans le tiroir, mais je me fais rattraper à chaque fois avant de réussir à les mettre en lieu sûr. Pour ça, j'ai besoin d'un plan et pas seulement du plan de la maison.
J'y travaille depuis des semaines et j'avais besoin de prérequis. Déjà, améliorer ma technique de fuite. Les virages à pleine vitesse me posent toujours quelques soucis et j'agite les bras pour m'aider à tourner, mais les slaloms entre les jouets m'ont bien fait progresser. Je me sens désormais prête.
J'avais aussi besoin d'apprendre à marcher avec un objet dans chaque main, une cuillère, un yaourt, un crayon, une bouteille d'eau, un bib, n'importe quoi. Ça, c'est bon aussi et j'arrive même à courir les mains chargés et un bib entre les dents.
Pour un plan d'une telle envergure, j'ai pensé à m'allier avec Larsen pour détourner l'attention de papa et maman, mais je crois qu'il a pas trop apprécié que je m'entraine à chiper des croquettes et que je me rince les mains dans son bol d'eau. Du coup, quand j'essaie d'en parler, il va se planquer sous le lit. Quelle susceptibilité ces chats ! En même temps, je lui fais confiance pour ne pas vendre la mèche.
Mon problème sera de choisir le bon moment, la cuisine est généralement fermée quand papa et maman n'y sont pas - malins les bougres - et je ne suis pas encore en mesure d'ouvrir la porte par moi-même - je ne mesure que 76 cm et les poignées se trouvent à 1,05. Donc, le chapardage doit avoir lieu en leur présence. Il s'agit maintenant de faire œuvre de patience et d'attendre le bon moment. Depuis deux ou trois jours, j'ai un peu calmé mes attaques sur les cuillères. Je me concentre sur les croquettes de Larsen histoire de leur faire baisser la garde.
Après, j'envisage trois phases :
1. Attendre la présence de papa et maman en cuisine au moment de la préparation du repas et les occuper en ramenant un bib d'eau vide par exemple ;
2. Commencer quelques chapardages innocents (pâtes, yogourts), les faire tomber, les remettre à leur place, et applaudir - ça les fait encore rire quand je m'applaudis pour une action réussie, profitons-en ;
3. Profiter de ce rire pour subtiliser une cuillère avant de repartir tranquillement avec un petit pot ;
4. Une fois la porte franchie, accélérer dans le virage pour passer la chicane de l'entrée. C'est le point délicat du plan, mais tout repose sur ça.
5. Une fois la cuillère bien planquée dans mon petit bazar je me précipite à nouveau dans la cuisine avec ma tête affamée/fatiguée. Imparable.
Nota bene : bon, après un essai ce soir, je note que j'avais toutefois oublié une étape préalable, c'est de ramasser tous les objets sur le chemin pour éviter de me vautrer en glissant sur une carte négligemment laissée là par je ne sais qui. Du coup, papa est venu me relever et "oh, t'as encore pris une cuillère, tu dois avoir faim". Oui, disons ça.
